Bureau du Commissaire

Quand on arrive devant le bureau du commissaire, on le reconnait tout de suite. Déjà trône sur la porte vitrée une inscription



L'oeil de l'arrivant est immédiatement attiré par la petite image qu'il y a sous l'inscription. Petite image qui est un cadeau de ses collègues flics en relation avec son caractère bien trempé. En effet, l'image représente un charmant requin, toutes dents dehors.

En poussant la porte, on entre dans un bureau pas très vaste et assez rangé, si on prend en considération les quantités de dossiers présents dans les armoires et dans le rayonnage rotatif. Une plante verte trône près de la baie vitrée. Baie vitrée qui offre d'ailleurs un panorama imprenable sur la ville de Depra.
Mais devant ce panorama, il y a le bureau du commissaire. Un grand bureau de bois vernis avec un ordinateur, un téléphone multiple, un plan de travail considérable, un fauteuil confortable mais plutôt fonctionnel et deux sièges pour visiteurs. Une rangée de chaises est alignée le long du mur et c'est à peu près tout.

En bref, plus qu'un bureau de commissaire, le bureau du requin.

La route défile, et les feux rouges n'en peuvent plus d'être grillés. Ouais on arrive de plus en plus vite en direction du Commissariat. Je me rappel du nom de ce Commissaire: Frank Ellis alias "Le Requin" sympathique comme surnom mais il faudrait pas qu'il se la joue alors que c'est qu'un putain de Commissaire qui reste le cul posé sur sa chaise toute la journée hein ?!

Calme toi, tu t'énerves avant de le voir...c'est pas bon tout ça. Il y a deux solutions pour laquelle il nous a convoqués moi et Mike: soit on a fait une connerie, soit c'est pour nous féliciter. C'est bizarre mais vu la réputation du type je penche plutôt vers la première. A vrai dire je m'en fous, faudra juste que je garde mon calme dans le bureau et tout va bien se passer. D'ailleurs pour me calmer, j'vais me griller une clope. Ray-Ban sur le bout du nez, j'aperçois maintenant le bâtiment imposant du Commissariat, toujours agréable a voir celui-là. Je me gare en face, et sort de la bagnole tout en disant à Mike une fois sortit de l'habitacle:

-Esperons que le "Requin" ne se la joue pas trop et qu'il ne nous prenne pas pour des "poissons rouges".

Une sorte de sourire se dessine sur mon visage, un sourire qui n'en est pas tellement un, c'est juste pour me détendre. Je traverse la route sans regarder, et évidemment, comme d'habitude, un connard vient s'arrêter en claxonant. Je me tourne vers mon collègue, et secoue la tête, m'approchant ensuite de la bagnole. Un coup de pied sur le par-choc, et le mec sort de la bagnole voulant jouer au héros avec moi. A ce moment là, je le choppe par le col de sa putain de chemise et le fous sur le capot, le maintenant d'une main, en sortant ma plaque de flic.

-Ta mère t'a jamais appris qu'il fallait fermer sa gueule devant un flic ?

Le gars s'excuse mille fois et me supplie de pas l'emmener au poste. Un regard méprisant et je répond:

-Casse toi de là...et vite...

Le gars se lève, me remercie et part en bagnole. Sa m'a permit de me défouler c'est cool. Je sourire à mon collègue et dit:

-Que les gens manquent de civisme...c'est impressionnant !

Un sourire, et nous rentrons tout deux dans le Commissariat. J'écrase ma clope dans le cendar' sur le comptoir de la secrétaire, et elle nous dit:

-Inspecteur Woodward et Ianvesky je présume ? Le Commissaire vous attend...

Putain on le savait déjà connasse ! Non...non...calme toi. Je marche avec mon collègue et prend l'ascenseur qui nous donne à l'étage des bureaux. J'avance dans le couloir aux côtés de mon collègue Mike, et j'aperçois la porte du "Requin". D'ailleurs une petite image avec un requin se trouve en dessous de sa plaque. Putain sa va pas le faire si il nous la joue Scarface alors que c'est qu'un Commissaire...mais non sa bien se passer j'te dis !

Je donne deux coups à la porte, et un "Entrez" sort de la bouche de notre boss. J'ouvre la porte, et aperçoit sa gueule, et son putain de bureau en prime. Il est pas à plaindre notre "Requin", il a un bel aquarium pour lui tout seul !

Je m'avance, et il se lève de sa chaise pour nous serrer la main. Je lui serre la main d'une bonne poigne, pour lui montrer qu'il a pas affaire à un putain de bleu. Après avoir serrer la main de Mike, il s'assoit et je fais de même. Je le regarde dans les yeux et attend qu'il nous explique la raison de cet entrevue...

Depuis son petit nid douillet

Comme à son habitude, Niko ne mit pas bien longtemps à rejoindre le Central. Bon sang, ce type est cinglé, mais dans le bon sens. Ca plaît assez à Mike, d’ailleurs. Il aurait détesté être avec un endormi du bocal.

Il avait quand même collé le gyro sur le toit, sans la sirène. Non qu'il doutait de la conduite de son collègue mais plutôt de celle des autres, en fait. Ca faisait souvent peur de voir certains conduire. Niko aussi dans son genre faisait un peu n'importe quoi, mais bien! Enfin, un jour il tomberait sur plus Fangio que lui, et là ça risquait de saigner. M'enfin en attendant, ça arrangeait pas mal notre ami Mike, car il restait à peine cinq minutes avant le rendez-vous chez le boss...

Bref, il arrivèrent deux minutes avant l'échéance. Impec' juste le temps de rejoindre le bureau du commissaire. Niko fit une nouvelle fois son petit numéro en traversant... en traversant! Il valait mieux avoir certains réflexes en face de lui. Un jour, un papy ne s'arrêtera pas, ça va lui faire drôle.

Mike regarda le gars penaud remonter dans sa voiture. Il rattrapa alors son collègue avec un sourire amusé.
- T'es un vrai fou, toi! Terminant sa phrase avec une tape amicale dans le dos alors qu'ils finissaient de traverser.

Les deux hommes montèrent donc à l'étage, après un passage express à l'accueil. Pour avoir essuyé pas mal de chefaillons de toutes envergures, il n'avait pas d'à priori sur celui-ci. Il entra donc silencieusement et sereinement, affublé de son collègue.

Après une poignée de main virile, accompagnée d'un signe de tête respectueux, il prit place dans un des sièges, imité par Niko. Ils allaient vite être fixé sur leur sort.

Le commissaire était assis à son bureau. Les coudes sur la table, les mains jointes au niveau de son nez, il paraissait nerveux. En fait, tout dans son attitude justifiait le doux sobriquet qu'avait reçu Frank Ellis dès sa sortie de l'école de police : Requin. Son regard inquisiteur semblait traquer la moindre faiblesse des deux arrivants. Ses épaules qui se soulevaient et s'abaissaient au rythme de sa profonde respiration montraient toute la tension qui était en train d'étreindre un corps somme toute assez banal mais marqué par l'expérience sur le terrain. Il considéra longuement les deux officiers et plissa les yeux lorsqu'ils s'assirent. C'est pourtant d'une voix tout à fait calme, terriblement atone qu'il s'adressa aux deux compères:

" Dites-moi ce qui a merdé dans votre formation, allez-y, je vous écoute. Allez, dites-moi ... Non, parce qu'à moins de trouver naturel d'abandonner une voiture de patrouille en pleine opération et d'aller picoler comme les derniers des pochards avant de faire votre rapport, je ne vois pas ... Non ! Je ne vois pas. "

Le ton était monté, doucement mais sûrement. Le commissaire serrait maintenant les poings et après avoir fermé les yeux, les rouvrit brusquement et pointa sur l'officier Ianveski un doigt accusateur.

" Vous, Officier Ianveski ! Dites-moi à quel moment vous avez confondu les avenues de Depracity avec un circuit de Nascar ! Merde ! Il me semble qu'on apprend à des gamins en cours élémentaire comment associer deux chiffres en un nombre cohérent. Ce même nombre que l'on retrouve sur les panneaux et sur la cadran de vitesse du véhicule et qu'il est EXPRESSEMENT ordonné de respecter. De même, les feux tricolores ne sont pas là que pour servir de chiottes aux cabots du coin: leur manque de beauté esthétique devrait vous renseigner sur leur côté pratique: quand la pastille est rouge, on arrête le véhicule. Je ne sais pas comment on pratique les choses en Russie mais chez les civilisés, c'est comme ça, et pas autrement ! "

Là, c'était monté en puissance. Le commissaire assénait attaque sur attaque, violemment. Il était atteint de crispations qu'il eût été cependant bien imprudent de qualifier de folie. Il regardait Nikolai d'un air profondément noir où se lisait une sévère détermination. Puis, ses yeux d'acier se reportèrent sur l'autre personne présente dans la salle:

" Quant à vous, officier Woodward ... Inutile de vous dire que c'est de guerriers que j'ai besoin pour ramener l'ordre dans cette ville. Dites-moi ... "

Le capitaine s'était redressé et avait mis les poings sur le bureau et prononça les paroles suivantes assez lentement, distinctement.

" Est-ce que la définition "d'inspecteur de police" comprend la dimension d'un pochtron qui va engraisser les poches d'un putain de fils de pute irlandais qui croit qu'il peut se tailler un territoire dans ma ville ? Dites-moi un peu ... Est-ce que ça ne vous viendrait psa à l'esprit que le fait de dépenser du fric dans son établissement lui remplisse les poches ? Vous espériez quoi ? Le rencontrer au détour d'un pilier de comptoir et lui tailler une bavette avant de lui mettre gentiment les menottes ? Tout cela à grands renforts de whisky-coca ? Mais bordel à quoi pensiez-vous ?

Je vous le répète à tous les deux, c'est de guerriers dont j'ai besoin. De types qui ont à l'esprit le serment qu'ils ont prêté le jour où on leur a remis leur plaque. "Protéger et servir", ça vous dit quelque chose ? Alors, j'espère que les deux inspecteurs se mueront en guerriers défenseurs de la loi et de l'ordre, et non pas en espèce de cow-boys solitaires. Nous ne sommes pas dans un film où à la fin, John Wayne s'éloigne avec Grace Kelly vers le soleil couchant. Non, c'est la réalité, avec son cortège de sang et de larmes. Maintenant, je crois que vous avez à faire avec le légiste. Voys y retrouverez le lieutenant Hatsen. Elle a été prévenue. "

Il avait craché ces dernières paroles, comme si l'idée de faire appel à une femme lui créait des aigreurs d'estomac. Comme si la guerre contre le crime qu'il menait quotidiennement ne lpouvait s'embarrasser de faibles femmes. Il considéra à nouveau les deux compères.

" Vous savez ce que vous avez à faire donc, allez-y ! Et n'oubliez pas de considérer tous les aspects d'une enquête. Je suis peut-être coïncé derrière ce bureau, mais le terrain, je connais. La dernière chose qui doit vous venir à l'esprit ... "

Et là, son regard se fit dur, noir et insistant. Tout ce qui faisait le requin rejaillit à la surface et il déclara froidement, presque comme une profession de foi:

" C'est que je ne connais pas le terrain. Maintenant filez. Vous avez à faire. "

Ce fut tout, le commissaire se rassit, détournant déjà son attention vers d'autres problèmes. C'est pas l'taf qui manque à Depra. Et de cela, c'est un des premiers hommes à en être conscient.

" Messieurs ! "

Là, ce fut un ordre du genre ... impératif.
Le commissaire sourit franchement devant le regard des deux inspecteurs et leur indiqua de rejoindre son bureau. Il avait un petit air de suffisance un brin agaçant mais il semblait ne pas en avoir fini.

" Je ne crois pas vous avoir permis de prendre congé de mon bureau.
Je vous ai posé des questions et j'aimerais bien y avoir réponse. "

La lanterne du sarcasme s'alluma au-dessus de sa tête maintenant souriante. D'un sourire mauvais, du sourire du prédateur ayant ferré sa proie. Miky et Nikolai avait fait une bourde de trop et le commissaire ... ben lui, il l'avait remarqué.

" J'ai juste une question. Pourquoi, à votre avis, je suis commissaire alors que vous n'êtes que deux inspecteurs de merde ? Vous triturez pas les méninges que vous n'avez pas, je vais vous y répondre. Parce que, plus jeune, je n'ai pas fait chier mon commissaire en conduisant comme un Ruskof bourré ou en me torchant la gueule comme le dernier des pochtrons dans le bar du petit mafioso irlandais du coin. Non, plus jeune, j'ai pas les conneries pour lesquelles on file des prunes au citoyen moyen. Plus jeune, j'ai dégainé mon arme quand il le fallait et je n'ai pas hésité abattu des gangsters avec leur clique quand il le fallait. Parce que j'étais un homme de terrain et un homme de bureau. Parce que je tapais mes rapports avant de ma saoûler la gueule, parce que j'étais un homme de confiance. "

Effectivement, son visage buriné trahissait une certaine expérience. C'est pas le commissaire qui sort de la grande école. Nan, le requin lui, sortait de la rue. Le commissaire avait refermé la porte de son bureau mais les flics du coin jetaient des regards rieurs devant le savon qu'il passait à Nikolai et à Miky. La plupart ne se rendait pas compte qu'il n'engueulait que ceux qu'il pensait pouvoir devenir meilleurs dans leur taf, vu que c'était pour la plupart des petits officiers de merde. A propos d'officier de merde.

" Vous voyez cette bande de couillons en train de taper des rapports qui se foutent de votre gueule ? Vous les voyez ? Eh bien, je peux vous dire une chose: ils n'attendent que le moment où je vais vous retirer votre plaque d'inspecteur et vous mettre à un carrefour avec un bâton et un sifflet. Et donnez-moi une putain de bonne raison de ne pas le faire ! "

Là, c'est clair, ça puait le rat crevé à cent mètres. Le commissaire avait à nouveau haussé la voix et son sourire s'était transformé en un rictus sévère. Des jeunes cons qui se faisaient flamber les ailes, il en avait vu passer. Il en avait dégommé certains, promu d'autres. Chez lui, ça marchait toujours comme ça, au mérite. Simplement, comme l'indique son nom: le mérite, ça se gagne. Et à la dure.

Un silence et je peux voir le Commissaire faire un signe de tête tout en regardant quelque chose sur son écran d'ordinateur. Cela veut dire que l'on peut disposer et je me tourne vers la porte et l'ouvre le bruit du couloir du commico' venant maintenant à mes oreilles. Je sort et attend Mike qui referme la porte puis je dis:

-Bon t'es prêt pour aller au légiste ?

Apparemment c'est okay et moi aussi et c'est pour cela que je marche avec lui dans le couloir regardant droit dans les yeux les putains de flics en uniforme qui ont l'air amusé du savon que nous a passé le Requin. D'un côté, c'est peut-être parce que nous pouvons être de bons éléments qu'il nous a convoqué, sinon il nous aurait retirer notre plaque d'inspecteur sans essayer de savoir le pourquoi du comment.

Après quelques minutes de marche dans le Commissariat, j'arrive face à la double porte menant à la rue. Je les pousse et je peux sentir l'air dégueulasse de Depra en vertu d'un temps gris à chier...comme cette journée en fait ! J'enfile quand même mes Ray Ban sur le nez pour le style et je prends le temps de m'allumer une clope que je coince entre mes lèvres, pour ensuite reprendre la marche et traverser comme à mon habitude jusqu'a la BM'.

Je la déverouille et pose mon cul sur le siége tout en mettant le contact et une fois que Mike est calé je joue un peu de l'accélérateur en disant:

-Bon, oublions ce connard et concentrons-nous sur cette affaire. On va lui prouver qu'on est pas des putains de bleux comme il l'air d'insinuer bordel.

Je tire une taffe sur ma clope et dit tout en recrachant la fumée lentement par la bouche et mes narines:

-J'espère que le lieutenant avec qui on est ne va pas nous prendre pour des bambins sinon sa va pas le faire.

Mon visage affiche un sourire et je continue d'accélérer toujours aussi vite mais en ne grillant plus les feux rouges. Ma conduite est fluide est rapide mais moins dangereuse car je respecte les feux. Je continue de discuter avec Mike tout en me dirigeant vers l'Hopital...

[=>L'Hopital]

Le requin voit les deux inspecteurs sortir et fermer la porte derrière eux. Il se lève et avance jusqu'à la fenêtre donnant sur le couloir. Il suit rapidement des yeux leur progression tout en scrutant le regard sarcastique des "collègues". Il ne sourit même pas, retournant s'asseoir à son bureau. Il se rejeta en arrière, croisa les mains derrière la tête et se permit un petit sourire de satisfaction. Puis, il revint à sa tâche, ouvrit un tiroir de son bureau et sortit deux dossiers qu'il posa sur son plan de travail. Il relut machinalement les titres : Inspecteur Ianveski Nikolai et Inspecteur Woodward Mike. Il sourit un instant puis il alla ranger ses dossiers dans l'armoire rotative. Il revint à son bureau et avant de pianoter, lâcha une phrase laconique:

" S'ils savaient ... Maintenant qu'ils me haïssent, on va enfin avoir des résultats. "

Il reçut un coup de téléphone. Il décrocha puis entendit les préliminaires d'un rapport sur l'opération du lieutenant Slater. On peut dire que son visage se ferma à nouveau et que son caractère primitif le gagna de nouveau. Il joignit rapidement sa secrétaire:

" Il me faut le rapport du lieutenant Slater dans les plus brefs délais. Laissez-le s'en remettre tout de même, mais montrez-vous assez pressante. "

Et dire que ce n'était que le début de la journée.

La deuxième tentative fut la bonne. Les deux inspecteurs eurent la permission de minuit pour quitter le bureau de leur supérieur C'était peut-être pas un mauvais bougre, mais bon sang, il faudrait qu'il apprenne l'art et la manière d'être aimable celui-ci...

Bref, Mike sortit à la suite de son collègue, et de dos avant de refermer la llourde, il lâcha.
- Bonne journée quand même, chef.

Si ça pouvait être le cas pour eux, ce serait pas mal d'ailleurs. Même si ça avait plutôt mal commencé. Rhaaa, bon sang, son mal de tête le reprenait. Il choppa son tube d'aspirine, et goba deux cachets sans attendre. Pouah!

Niko lui demanda alors s'il était prêt pour aller au légiste. Bon disons qu'il aurait bien fait un golf avant, mais certain que le commissaire lui en aurait fait le reproche, aussi il répondit.
- Je te suivrai au bout du monde mon grand!

Avec un petit clin d'oeil et à haute et intelligible voix, histoire d'emmerder un peu plus les pingouins qui se marraient toujours. Non, ils allaient pas être contrarié non plus pour si peu.

Les deux hommes rejoignirent donc la voiture sans plus de cérémonie. Direction, Puzzleman...

Petite visite chez le "Ducky", oui bon le légiste quoi!

Je toque à la porte et ouvre de suite. Salut impécable ou presque.

"Vous m'avez demandé, Monsieur?"

Là, j'en suis limite à la question type militaire... Et je vais en prendre plein les dents. Adieu la médaille...

Le commissaire était debout à côté de la fenêtre, en train de regarder la ville s'étendant paresseusement de part et d'autre de la Riviera. Il attarda un peu son regard sur les gratte-ciel des entreprises d'assurances, des banques, des bourses e tutti quanti. Il reporta son regard haineux sur le lieutenant et d'une voix qui n'avait rien d'amical commença son speech :

" Je me réjouis de voir que vous êtes en pleine possession du sens de la vue et je déduis de votre rang de Lieutenant que vous avez passé avec succès les tests de lecture et d'écriture.

Néanmoins, je vais vous rappeler quelque chose. Vous officiez à Depracity ! Si ,si, c'est vrai : à Depracity. Or, dans !Depracity, il y a le mot !"city". Vous savez ce que veut dire le mot "city" ? Je vais vous épargner toute réflexion inutile: "City" veut dire "ville" et non pas "zone de combat". Une "ville" si vous le savez pas, c'est un endroit plutôt grand avec plein de bâtiments bizarres où vivent des gens, des gens que votre serment vous ordonne de "protéger et servir" ! Je pense que c'est suffisamment clair ! Vous devez protéger les gens qui vont chaque jour au boulot, qui vont faire jouer leurs enfants au parc ou qui vont faire leurs courses et pas leur faire pleurer leur mère en faisant chanter votre Desert Eagle façon Marche des Walkyries ! Alors je voudrais vous demander une simple chose, franchement pas compliquée, une question simple ...

A QUEL PUTAIN DE MOMENT VOUS AVEZ CONFONDU LA VILLE DE DEPRA AVEC UNE ZONE DE COMBAT ?

Vous voulez me le dire ?! J'ai regardé vos performances: un 36 tonnes étalé en plein milieu de la route avec de la coke un peu partout autour, des tirs sur civils, une course poursuite à la Mad Max, un nombre de tués lors de la dernière mission qui nous ramène au temps d'Al Capone, sans compter les camionnettes qu'on est toujours en train d'essayer de reconstituer façon puzzle.

Mais bordel, si votre truc, c'était de tendre des embuscades, fallait vous engager dans l'armée ! "

Ouais, l'commissaire est comme qui dirait pas dans un bon jour. A croire que le café du matin avait été une vraie lavasse. En même temps, vous avez déjà goûté un café aux Etats-Unis ? Il est dégueulasse leur café. Ce qui pourrait expliquer en partie l'humeur continuellement massacrante du Requin qui, d'ailleurs, vient de reprendre son souffle et continue à causer:

" Bon, maintenant, je vous écoute: c'était quoi le problème ? Vous avez intérêt à être convaincant. Faudra que j'explique au procureur pourquoi les docks ressemblent à Bagdad ! "

Et encore, à Bagdad, ils s'amusent à plusieurs. Là, Slater a fait ça tout seul. Chapeau, vraiment ... Il ferait succès dans l'armée. Sauf que voila, là, c'est pas un champ de bataille, c'est la ville de Depra. Le commissaire regarde Slater d'un oeil noir, du genre d'oeil revolver prêt à te faire passer par la fenêtre, et même si le commissaire fait une bonne tête de moins que Slater, n'empêche qu'il se dégonfle pas le requin.

Ah ouais, c'est pas une légende : le commissaire de cette ville est vraiment le plus gros connard recruté par la police depuis la nuit des temps...
Et faut voir ce qu'il m'envoie...

"Monsieur le commissaire, aujourd'hui, alors que, comme tout citoyen américain normal, je faisais des courses, on m'a arrosé devant un magasin à la gatling. Il m'a semblé que c'était justement mon devoir d'empêcher ce genre de dangers de se ballader en ville avec une camionette qui transporte une mitrailleuse lourde en arrosant les clients des magasins qui ne leur plaisent pas.
Je ne pouvais pas envisager un moment que ces types étaient en réalité une organisation terroriste prête au suicide pour ne pas laisser la police remonter jusqu'à eux.
Enfin, quand ma vie est en danger, j'ai assez peu de scrupules à éliminer tout ce qui la met en danger."

D'où la question : dois-je tuer les automobiliste, les ouvriers des usines poluantes, les écologistes, les producteurs de produit bio, le commissaire et les témoins de Jéhova? ça devient compliqué tout d'un coup.

"Le reste est dans mon rapport."

Wouah, je ne me suis même pas énervé. Même pas dit une connerie. Je suis presque fier de moi, là.

" Slater ... Croyez bien que si je suis assis ici, dans ce bureau précisément, avec cette distinction précise de Commissaire de Police de Depracity ... C'EST QUE JE SAIS UN MINIMUM LIRE UN PUTAIN DE RAPPORT, C'EST CLAIR ? Pour être sûr de me faire parfaitement comprendre ... Vous êtes Lieutenant, si je ne m'abuse ... En tant que Lieutenant, vous êtes censés connaître un minimum en quoi consistent les forces de l'ordre de Depracity ! Si vous aviez identifié une arme lourde, POURQUOI ne pas avoir appeler directement l'unité du SWAT au lieu de la jouer Cow-boy solitaire ? Les justiciers façon Clint Eastwood qui font le ménage par le vide n'ont pas tellement bonne presse en ce moment. J'espère qu'à l'avenir, vous vous montrerez plus prudent ... "

Le commissaire se détourne un instant vers la fenêtre et contemple la cité. Il interrompt rapidement sa rêverie pour en revenir au Lieutenant-tête-brûlée. Il le considère de haut en bas avant de lâcher une phrase laconique, ne pouvant être entendue du couloir, si ténue que même Slater doit se demander s'il n'a pas rêvé:

" Mais toujours aussi efficace. "

Le silence se fait à nouveau alors que le commissaire compulse rapidement deux ou trois feuillets. Il plisse les yeux, retient deux ou trois informations et reporte son regard toujours dur et sec sur Slater:

" Deux choses : Avez-vous des questions ? Deuxièmement: qu'avez-vous projeté de faire à présent ?

Euh... il a dit quoi? J'ai un doute... Je crois avoir entendu une félicitation au milieu des gueulements, mais j'en suis pas sûr. Finalement, c'est peut-être pas tout à fait mort pour la médaille. Il doit suffir de faire l'enquète en complet, de trouver les terroristes islamistes tchètchènes ex-agents dormants du KGB et le tour est joué. Je deviens un héros national. J'aime bien l'idée et il faut dire que maintenant que j'ai commencé à caresser l'espoir, c'est un peu comme la branlette, impossible de s'arrêter avant la fin.

"Je comptais retourner sur les lieux pour faire une enquète en bonne et due forme, ces mecs ont laissé six cadavres sur la route, il doit bien en avoir un d'identifiable. Même chose pour la camionette, les empreintes qu'ils ont du laisser sur place, les cheveux et tout le bataclan. Je pense qu'on doit pouvoir les retrouver sans grande difficulté. Mais avec beaucoup de travail, c'est pourquoi je désire m'y atteller au plus vite."

En gros je désire être héliporté loin de la zone du front, parce que le commissaire tire à la munition non-conventionelle façon minigun. Et j'avoue que j'en ai déj pris assez dans la gueule pour la journée...

" Et alors, qu'est-ce que vous attendez ? Une autorisation signée du Président ? Foncez Slater, et finissez-moi cette enquête. Ce sera tout, Lieutenant. "

Pas bavard le commissaire ... Plutôt pressé de retourner aux autres enquêtes. Il salue Slater de la tête et s'en retourne à son bureau. Ptêt pas l'moment d'tirer la cordelette comme en témoignent les petites rides sur le coin des yeux. L'a plutôt l'air du genre tendu ...

Et ça y est, je me refais engueuler... Putain, mais comment j'ai envie de lui dire le fond de ma pensée à ce gros connard de commissaire! Non mais franhcement, ce n'est plus de la haine, c'est pire que ça! Ce mec prend juste du plaisir à rabrouer ses subalternes, c'est ça? C'est une pouriture de masochiste...

Bon, on se casse, je vais finir par l'insulter, le commissaire. Petit signe de tête en guise de salut et je sors. Dehors, je choppe un pauvre officier qui ne demandait rien à personne mais qui est le pauvre mec qui me tombe sous la main à ce moment là.

"Toi, tu vas voir si la police scientifique et l'identité judiciaire sont déjà en marche, il me faut trois patrouilleuses avec effectifs correspondants. Si vous avez des inspecteurs sous la main, vous me les envoyer!"

Ils veulent que je leur fasse une enquète, et ben je vais leur faire une enquète, je vais mobiliser tous les moyens disponibles quitte à appeller pour cela le SWAT.
J'arrive prêt de la standardiste.

"Qu'est-ce qu'on a sur les docks suite à la fusillade?
-Deux patrouilleuse, doit quatre agents.
-Merci."

Allez, c'est parti, je vais leur montrer c'est quoi une enquète.

Je reste muet dans la patrouilleuse, le regard terne et morne en dit long sur mon état actuel. Pour la première fois j'ai l'impression de me glissé dans la peau de tout les truands que j'ai pu menotter durant ma carrière, je ressens ce sentiment d'impuissance et de rage qui m'était inconnu auparavant et que je ne pensais jamais ressentir pour être franc...

"Vous n'êtes pas en état d'arrestation, à moins que vous nous y forciez. Le commissaire préfère vous laisser une chance de vous expliquer plutôt que de salire votre dossier avec ce genre d'évènements. Il vous attend dans son bureau."

Et bien mon destin ce jouera là-bas apparament, dans le bureau de ce gros connard de commissaire véreux. il va falloir que je joue carte sur table, je vais lui expliquer toute cette histoire avec la plus grand franchise possible, en espérant qu'il ne soit pas trop dur.

Et là ... C'est le drame. Vous connaissez l'expression du calme avant la tempête ? En fait, vous avez tous dû ressentir cette émotion du moment où vous débarquez dans une pièce où règne une tension apocalyptique, où le moindre mot de travers va déclencher le massacre. Et ben là, c'est à peu près ce que doit ressentir Carlson en voyant le commissaire. Le bonhomme est pas très épais, mais toutes les fibres musculaires de son corps sont tendues à l'extrême, comme s'il allait d'un coup exploser de rage, façon éruption du Stromboli en allegretto. Le commissaire fait deux pas saccadés et vient s'asseoir face à Carlson, vraiment face à lui. Il rive ses yeux dans celui de l'inspecteur et l'expression le regard qui tue prend toute sa véracité.

" Inspecteur Carlson, vous avez exactement trois minutes pour me résumer en détail ce qui s'est passé et ce qui a motivé une intervention du SWAT pour vous ramener ici. Trois minutes... "


Et c'est parti ...

Exactement une minute et cinquante-trois secondes. C'est ce que compta le commissaire lors du rapport de Carlson. Pendant ces (très longues) cent treize secondes, il n'avait pas décollé ses yeux de ceux de l'inspecteur. Sacrée pourriture que cet old fellow: toujours à cacher la moindre once de sympathie qui pourrait avoir l'idée saugrenue de paraître sur le visage, Requin reste on ne peut plus fermé.

Lorsqu'enfin, l'inspecteur achève sa tirade, il prend la parole d'un ton sec. Pas agressif cependant. Mais sec, et coupant comme une lame de rasoir de Séville. Vous connaissez la réputation d'excellence qu'y tiennent les barbiers ...

'' Inspecteur Carlson. Je vais vous poser deux questions. Répondez-y strictement. Sans un mot de trop.

L'homme qui accompagnait la lady avait-il un air suffisant, un regard superbement hautain et magnifiquement insupportable, des cheveux blonds tirés en arrière comme un mauvais playboy de magasine, une taille moyenne et des manières de fouine ?

Deuxième question: seriez-vous prêt à sacrifier les suggestions de votre indic' pour ce que je vais vous dire.

Inspecteur, je vous préviens ! Attention où vous mettez les pieds... ''

Car inutile de dire que le commissaire, lui, met les pieds où il veut ...
Et qu'il a l'air à la fois vache d'énervé et complètement sadique.

J'étais assez satisfait de mon monologue, clair, net et sans en faire des tonnes. Néanmoins, je stressais comme pas permis devant le commissaire et en même temps il y avait de quoi, c'était ma toute première affaire à Depra et peut être déja ma dernière...
Apparemment le commissaire semblait assez neutre devant mes arguments, je ne savais pas vraiment si c'était un bon signe...

'' Inspecteur Carlson. Je vais vous poser deux questions. Répondez-y strictement. Sans un mot de trop.

L'homme qui accompagnait la lady avait-il un air suffisant, un regard superbement hautain et magnifiquement insupportable, des cheveux blonds tirés en arrière comme un mauvais playboy de magasine, une taille moyenne et des manières de fouine ?

Deuxième question: seriez-vous prêt à sacrifier les suggestions de votre indic' pour ce que je vais vous dire.

Inspecteur, je vous préviens ! Attention où vous mettez les pieds... ''

*Réponds net et précis Dan, net et précis...*

-"Le type qui était avec Sueles est la copie conforme de votre description commissaire...

...et je retiendrai le conseil soyez-en sûr..."

" Bien, Inspecteur ... Bien. Vous voyez ... On avance, on avance. L'homme que je viens de vous décrire a commis l'erreur de ne pas signer de plainte contre vous. Il se prend pour un personnage important. Vous n'avez pas arrêté n'importe qui, Inspecteur. S'attaquer à Monica Sueles, il vous faut un sacré paquet de couilles. "

Oh, oh ... Le commissaire a l'air de s'être détendu, ou presque. Ou alors, il dissimule vachement bien son énervement. En tout cas, il fixe toujours Carlson de son regard à pétrifier un bison. Ca doit être lourd à soutenir un regard pareil. Surtout quand il dure. En fait, on a la nette impression que le commissaire détaille son prochain repas.

" Quant à mon conseil, débarrassez-vous sans tarder de cet indic qui se permet de vous donner des ordres. Maintenant que vous vous êtes empêtré là-dedans, y a plus qu'une chose à faire.

Vous me mettez tout en oeuvre pour boucler Sueles. l nous faut une arrestation spectaculaire. Un coup médiatique sans précédent. Vous me lui collez une complicité avec un trafic de cocaïne impliquant des enfants. Ce sera porteur et vendeur. Une seule consigne: vous me la faites tomber.

Compris ? "

Autrement dit, c'est ta dernière chance de briller Carlson, après le commissaire t'éjecte sans préavis.