Enquête sur Run Bull Street

"Agents McGregor et Lin, FBI."

J'exihbait ma plaque pour la troisième fois depuis que Lin et moi avions passé le cordon de sécurité qui bouclait quasiment toute la rue. La police de Depracity, à défaut d'être efficace en pleine action, semblait bien plus entraînée à sécuriser les scènes de crimes. Un détail que j'ai remarqué plusieurs fois depuis mon arrivée ici, et qui ne fait que me confirmer que les forces de l'ordre sont totalement dépassées par les événements. J'avais toujours résolu mes affaires avant d'atterrir ici, mais depuis quelques temps, je sens que la situation échappe à mon contrôle, et c'est loin de me plaire.

Le lieutenant de police qui se tenait devant moi semblait légèrement verdâtre, il sortait de l'immeuble ou avait eu lieu ce que j'avais entendu plusieurs fois comme étant qualifié de carnage. Je l'alpaguait alors qu'il tentait certainement de trouver un coin tranquille pour vomir tripes et boyaux. Il avait ravalé la bile qui lui stagnait dans la bouche à l'énonciation des initiales de mon département. A croire que l'intervention du FBI dans cette affaire était une surprise totale. On est quand même chargé de la sécurité du pays, et les carnage signifient clairement que la sécurité du pays a des reproches à se faire.

Lin et moi avons été dépéchés sur place en catastrophe, avec pour seules informations l'adresse et le nom du gang. Neo Black Muslim... Putain de merde, ces types étaient pas des enfants de coeur pourtant. Le FBI a carte blanche pour ce qui de démasquer et de punir les Mafias, celle-ci était déjà répertoriée, mais à défaut de preuves vraiment sérieuses, impossible de démanteler le réseau. Il semble que quelqu'un s'en était chargé à notre place. Et ça dépasse le simple démantèlement. On avait un infiltré chez eux, mais comme dans toutes les institutions, la hierarchie se fout des échelons inférieurs, alors on sait pas qui sait, ni à quoi il ressemble. Va savoir s'il est crevé à l'intérieur comme le reste du gang, ou s'il a réussi à s'en tirer... je suppose que j'aurais des réponses plus tard. De toute façon, si le gang n'existe plus, ou s'il a été buté, son dossier doit être déterré pour qu'il puisse avoir les honneurs... Chienne de vie.

L'officier que j'ai interpellé se rappelle à nous avec un gargouillis qui laisse clairement entendre qu'il eput plus retenir grand chose. Il s'éclipse précipitamment alors que la gerbe lui gicle entre les doigts. J'évite un jet répugnant qui va s'écraser un peu plus loin. 9.5, bon lancé, mais un peu mou sur la descente.
Putain, j'raconte n'importe quoi.

J'arrive à choper un nouveau gugus, plus frais celui-ci, et lui exhibe ma plaque sous le pif, reprenant le refrain habituel. Y'a bien un responsable dans le coin, un enquêteur, un inspecteur, n'importe quel péquenot qui sait pisser droit et qui garde la tête froide. Le mec me balance un nom, Hatsen, et m'indique d'un doigt cagneux l'intérieur de la maison où les flash des appareils photo de la criminelle illumine les murs à intervalles réguliers. Un regard vers Lin:

"Tu reste à l'extérieur, empêche les gens de trop parler, faut pas trop ébruiter tout ça."

Signe de tête approbatif, et Lin s'éloigne. Un bon gars ce Coréen, pas très bavard, mais très à l'écoute, et plutôt efficace. Mais passons.
J'ai à peine le temps de passer la porte d'entrée que je suis déjà obligé de choper un autre couillon par le col pour lui demander qui est le Lieutenant Hatsen parmi la fourmillière de flics qui squattent rien que le rez-de-chaussée. La personne qu'il m'indique n'est pas vraiment celle à laquelle je m'attendais. Déjà, c'est une femme. Plutôt pas mal, un peu plus jeune que moi, un regard bleu glacial capable de faire fondre un iceberg... Paradoxalement paradoxal.
J'suis peut-être vieux jeu, mais j'ai jamais été convaincu que la police soit un bon plan pour les nanas, jouer avec des gros calibres et bouffer des donuts c'est plutôt un truc de mec. Mais bon, va falloir que je fasse avec.

Je m'approche du lieutenant Hatsen et sort une énième fois ma plaque que je lui passe sous le nez pour attirer son attention. Faut dire qu'avec les sirènes à l'extérieur, les discussions à l'intérieur, on entendrait pas une fanfare approcher avant qu'on ait la gueule dans le tuba.

"Arthur McGregor, FBI. Lieutenant Hatsen, c'est bien ça?"

Bien sûr que c'est ça, mais passons les politesses.

"Cette affaire relève de la sécurité nationale. J'aimerai que vous me fassiez un rapide topos de la situation..."

Eh bien ... Je m'attendais pas à ce qu'on m'appelle pour une telle enquête. Après avoir quitté un Falcon X qui s'est écrasé sur le tarmac, je me retrouve avec un hélicoptère du SWAT au beau milieu de la rue. Je suis obligée de me transformer en tornade à gueuler des ordres de partout du haut de mon superbe rang de Lieutenant: tenir les journalistes à l'écart, laisser bosser la scientifique dans le Rez-de-chaussée, ramasser les bouts de cadavres qui traînent, faire le tri entre les morceaux de ferraille et ceux de chair. Saloperie de journée, ça se présente mal. On essaye de regrouper les témoins, mais l'immeuble était assez excentré, et vu le carnage, ça m'étonnerait pas que personne n'ose parler. A l'entrée, des cadavres, et encore des cadavres, des douilles de balles à tire-larigo ... C'est pas Bagdad, c'est ... Téhéran aux heures de pointe. Mon Dieu quel carnage. A l'étage, hommes, femmes et enfants y sont restés. Rien de joli, ça aurait eu l'air d'une exécution en règles si les personnes présentes dans les lieux n'avaient pas eu autant d'armes. J'ai vu une M60 cabossée au sol, des restes de Uzi et d'armes de poing diverses. C'est encore le merdier, une effervescence sans nom règne dans les locaux et je me retrouve déjà au beau milieu d'un bon bordel.

J'appelle le commissaire pour lui faire part de la situation ... merdique que je rencontre. En tant que Lieutenant, mon nom est en tête de l'enquête mais vu les proportions que ça prend, il est clair que je pourrai pas mener cette enquête de front toute seule. Et d'un coup de baguette magique, on dirait que mes voeux les plus chers s'exaucent. Je vois des gens en costume qui s'approchent du lieu. Ca pue le Fédéral à plein nez. Y a qu'eux pour venir en costard dans un endroit où ça sent ... la mort comme cela. Dire que j'suis là avec mes fringues de sécurité et ma coiffure ... minimale dans cette antre de mort.

Le type se dirige vers moi et se présente tout de go. McGregor, Arthur. Federal Bureau of Investigation. Apparemment, c'est lui l'agent qui remplace Jack Stansfield. Pourquoi pas. J'acquiesce d'un signe de tête sur le côté à sa question. Un topo sur la situation... Mes yeux parcourent la scène des crimes, lentement, je me retourne vers un officier en train de vomir.

" Bonjour, Agent spécial. Un topo sur cette situation dites-vous ? Je vais tenter d'être concise. Mis à part la voiture encastrée dans le mur, un hélicoptère en plein milieu de la voix, on a recensé pour le moment trente-deux cadavres. Tous afro-américains, indistinctement hommes, femmes et enfants. Mais on a aussi six pertes parmi le SWAT qui se trouvaient dans l'hélicoptère et deux policiers morts qui se trouvaient dans la patrouilleuse 17, retrouvée dans le fossé non loin de là. Un vrai carnage comme vous pouvez le constater. Selon ce qu'on a retrouvé des vêtements, apparemment, on a affaire à des gangsters de différents clans. Par ici la suite de la visite.

Je l'entraîne au premier étage. Ca a cartonné pas mal et les murs sont calcinés de partout. Ca a tiré à la grenade, au fusil à pompe, au petit calibre. Mais tout ça, il le sait, pas besoin de lui apprendre son métier. On traverse les salles les unes après les autres qu'il puisse s'imprégner du lieu. Je ne sais pas trop ce qu'il me veut, mais dans le doute, autant lui servir de guide. Les gars de la Division Scientifique ramassent des munitions de tout calibre ... On a plutôt l'impression d'être à Téhéran qu'à Depracity. Mon Dieu ... jamais je n'aurai pensé voir ce type de fusillade. Je savais que Depra était un temple de la criminalité, mais là ... On bat des records.

Reste à espérer que les médias ne s'emparent pas de l'événement pour montrer une fois de plus qu'on ne vit pas dans la ville la plus sûre des Etats-Unis. Mis à part cela, je me demande comment un Fédéral qu'a pas fait beaucoup parler de lui jusque là réagira à tout ce bazar. D'autres policiers ramassent des morceaux de cadavres. Les grenades ont parlé à cet étage et ce qu'elles n'ont pas détruit, le feu s'en est en partie chargé. Cette odeur de cadavre brûlé envahit tout l'étage et me prend à la gorge. Une belle matinée en perspective.

Serait-ce une lueur de soulagement que surprend dans les yeux du Lieutenant, peut-être bien, difficile à dire. D'ordinaire, quand les fédéraux débarquent quelque part, c'est plutôt des regards mauvais et méprisants, comme si ça m'amusait moi, de venir me faire suer sur une scène de crime ultra-sanglante. A croire que ça m'amuse de leur piquer leur boulot. Si ça tenait qu'à moi, je m'occuperais que des affaires de sac à main volé et de vols à l'étalage. J'ai une famille moi, j'aime pas forcément l'idée de leur imposer la crainte de pas me voir revenir un soir.

Hatsen me ramène à la réalité en entamant le topo que je sui ai demandé. Quarante morts au total, dont quelques flics. Je comprend mieux pourquoi on nous a envoyé. C'est plus du règlement de compte, c'est de l'exécution pure et simple. Mon sang ne fait qu'un tour quand elle m'annonce la mort de femmes et d'enfants.
Je crois pas être quelqu'un de tendre, j'en ai vu des saloperies durant ma carrière, même en tant que simple flics. Des règlements de comptes aux drame familiaux. Mais rien ne prépare vraiment à la vue d'un enfant mort. Ce ne seront pas mes premiers, mais je prie chaque jour pour que ce soit les derniers. On ne s'habitue jamais à ce genre de spectacle, encore moins quand on est père. L'idée même que quelqu'un pourrait brutaliser mon fils ou ma fille me met dans un tel état de rage que je pourrais certainement anéantir tout un pâté de maison si j'explosais.
Le meurtre d'enfants c'est vraiment le truc qui me met de mauvais poil, et c'est rarement bon signe pour le meurtrier.

Je reviens aux paroles du lieutenant, et ces dernières paroles me paraissent très obscures. Comment ça d'après les vêtements? Comment peut-on identifier des gangs simplement par des vêtements?
Bien sûr, je connais le goût de certain pour des couleurs uniques où des vêtements particuliers, mais c'est de loin la pire ânerie que j'ai entendu de croire qu'on puisse fonder la moindre hypothèse sur des vêtements à moitié calcinés. En plus ça ne ressemble pas à un règlement de compte, bien qu'au niveau de la mise en scène ça pourrait coller. Je suis peut-être pas très calé en guerre des gangs, je le reconnais, mais généralement le gang rival signe son exploit de façon plus ou moins discrète, moins que plus d'ailleurs. J'ai tout de même l'intention d'éclaircir ses paroles, parce que je suis pas sûr d'avoir bien compris.

Je profite d'un silence, alors que nous grimpons au premier étage pour tenter d'élucider le mystère de ses derniers mots.

"Attendez une minute. Vous dites que "d'après les vêtements", on aurait à faire à des clans différents? Pourriez-vous être plus précise? Qu'est-ce que vous entendez par plusieurs clans?"

Si effectivement plusieurs clans on attaqué le bâtiment, ça pourrait expliquer l'état de l'immeuble, mais ça me paraît tellement peu probable que je préfère éviter d'hypothéquer quoi que ce soit. Je ne suis pas à Depra depuis très longtemps, c'est vrai, mais assez longtemps pour comprendre comment fonctionnent la ville et ses groupuscules. Et les gang des quartiers sensibles feront couler beaucoup d'eau sous les ponts avant de s'allier. Ces enfoirés sont plus fiers que des coqs gavé de testostérone...

Apparemment, j'ai dû aller trop vite. Il n'a pas raccroché tous les wagons. Je ne sais pas trop comment lui expliquer: je n'ai même pas l'ébauche d'une hypothèse. Pas la moindre thèse censée, alors lui faire comprendre que des bouts de tissus calcinés révèlent le fait qu'on a plusieurs morts de différentes origines sur place, je comprends que ça puisse choquer. Je vais tout de même tenter de faire simple avec ma connaissance (pas très brillante mais tout de même des hauts lieux de la criminalité de Depra City). Je m'arrête dans ce qui devait être un couloir, non loin d'un cadavre et regarde l'agent. Je clique lentement des yeux, plus pour me donner une contenance que pour rassembler mes esprits. Dire que j'aimerais effacer l'odeur de chair brûlée qui hante ces lieux aussi facilement que je dissipe une larme d'un clignement de cil serait tout à fait conforme à la réalité mais il me faut faire avec.

" Entendons-nous, monsieur. J'ai bien parlé de différents clans et non pas de clans ennemis. Tout ce qu'on sait pour le moment, c'est que ce qui faisait les forces vives de plusieurs gangs a été décimé dans cet immeuble. "

Consciente de ne pas être très claire, je m'interromps. L'affaire est étriquée, corsée... Il me faut présenter cela de la manière la plus simple possible... Tenter de lui dire que les différents clans présents n'étaient pas forcément ...

" Ce que je veux dire ... C'est qu'on a observé que femmes et enfants portaient des couleurs différentes mais bien choisies. Des couleurs que l'on retrouve chez certains groupuscules notoires.

Retrouver ici trois femmes vêtues de couleurs différentes montre que ce squat servait d'abri à différentes familles. On a retrouvé pas mal d'objets de vie: des réchauds notamment, même un vieux réfrigérateur. Des matelas... Vu la concentration des familles ici, je dirai qu'on a affaire à une sorte de quartier général. "

Même si mon hypothèse d'un rassemblement de clans a l'air absurde, j'espère que le Fédéral daignera y accorder quelque crédit. Pour le moment, on patauge dans le noir le plus complet. Ce qu'il peut juste voir au premier étage, c'est que la femme retrouvée dans la pièce de droite portait un haut noir et vert, complètement différent de celui de celle qu'on a croisé au rez-de-chaussée qui portait des vêtements jaune et bleu. C'est qu'un début de piste...

Non loin, un cadavre a l'air particulièrement mal en point... Je veux dire ... Mis à part le fait qu'ils sont tous flingués et calcinés, lui me révulse complètement. Lui ... Il a reçu un coup de fusil à pompe à bout portant en pleine figure ... Vu la corpulence, il devait être jeune ... Pas plus de vingt ans... Mon Dieu ... Je regarde l'agent spécial, tentant de déceler une quelconque émotion. Apparemment, voir de toutes jeunes personnes a l'air de le faire sortir de ses gongs. Et à en juger par l'odeur, le carnage n'a pas fini de nous révéler son ampleur. Encore trois étages à regarder

J'avais effectivement rien compris à ce qu'elle m'avais dit. Les nouvelles explications me paraissent d'autant plus acceptables. Elle attire mon attention sur les vêtements aux couleurs différents, ce qui continue à constituer des preuves bien trop minces à mon goût. Je ne sais pas qui sont les fous-furieux qui s'en sont pris à ces gangs, s'ils sont plusieurs, mais ils n'en ont laissé aucun vivant. Y'avait de la vengeance dans l'air. La marogue va avoir du boulot ce soir, ne serait-ce que pour identifier les corps, éparpillés un peu partout. Je ne sais pas trop quoi penser de cette affaire, ce qui est sûr c'est que les attaquants avaient une sacré artillerie, les murs ont été défoncés à la grenade, les impacts dans les murs encore debouts sont parfois aussi gros que poing, je suppose que certains avaient des armes automatiques, peut-être même des fusils d'assaut, et les traces caractéristiques de plusieurs fusil à pompes et autres armes à dispersion.

J'incline brièvement la tête vers le lieutenant pour lui signifier que j'ai bien compris de quoi elle me parlait. Je n'aimerai pas qu'elle croit que je ne l'écoute pas. Je suppose qu'elle attend un avis. Le problème, c'est qu'avec toute la bone volonté du monde, je n'arrive pas à me faire à l'idée qu'on puisse monter une hypothèse à partir de simples vêtements.

"Pour être franc lieutenant, bien que je ne considère pas votre hypothèse comme totalement asurde, je ne peux résolument m'y fier. Pour le moment nous avons trop peu d'éléments pour déterminer si ces personnes appartenaient réellement a des gangs différents. Ce qui est sûr, c'est qu'ils étaient tous rassemblés sous la bannière d'un seul et même nom: les Néo Black Muslim. Peut-être cela vous dit-il quelque chose?"

Je fait rapidement le tour de l'étage, observant les cadavres d'un oeil éteint, notant mentalement les détails qui pourrait s'avérer intéressants. Le problème, c'est qu'à part des impacts de balles et de fragments de grenades, les détails intéressant ont été effacés par l'incendie. Autrement dit, il n'y a pas grand chose à relever, si ce n'est qu'on a aucune piste quant aux auteurs. Ce qui m'étonne le plus, c'est qu'à moins que les attaquants aient eux aussi été afro-américains, et sapés comme des gamins avec les fringues de leurs parents, ils semblent ne pas avoir laissés beaucoup de cadavres, aucun en fait.
Je suis curieux de découvrir les autres étages, enfin, pas trop quand même, mais je suis quasiment certain que les preuves sont là, quelque part, et qu'on arrivera à coincer ceux qui ont fait ça. Il le faut. Des criminels comme ça, on ne peut pas les laisser en liberté, surtout des types capables de tuer des enfants.

Je ne devrais pas m'énerver. Mais comment faire autrement? Cette situation n'aurait jamais dû se produire. Tout ça pourquoi? Parce que personne n'est capable de faire son boulot convenablement, les flics sont de vrais mous du genou, incapable de pousser les enquêtes assez loin pour les mener à bien. Je ne veux pas que mes enfants puissent se sentir en danger dans leur ville, ou même qu'ils le soient. Les gangs ont pris l'habitude de faire la loi sans être inquiétés, mais la loi va les rattraper et je serais là pour les voir s'effondrer.

Ce serait-y pas qu'il me prendrait pour une incapable ? Je sais que j'ai l'air d'une jeune femme perdue mais quand même. Je me demande d'où sortent ces Fédéraux pour croire qu'il n'y a que leur version qui est bonne !
Mon Dieu, mon Dieu, mon Dieu.
D'où sort-il la référence aux Neo-Black Muslim ... Il souhaite envoyer une croisade et purger l'Etat d'un groupuscule populaire dans les milieux noirs ? Un raciste de plus, souhaitant la suprématie de "la race blanche", qui va coller au mouvement une implication dans un carnage ayant eu pour cible des femmes et des enfants ?
Calme-toi, ma fille, tu t'emballes, tu t'emballes ... Après tout, il est peut-être juste complètement choqué par cette histoire.

" Serait-ce abusé de ma part de vous demander de quel chapeau de magicien vous sortez la référence aux Neo Black Muslims ? "

Histoire de montrer d'un ton mi-figue mi-raisin que je souhaite que lui aussi partage ses informations. Après tout, ma hiérarchie n'a peut-être pas jugé utile de m'informer de ce dans quoi je m'impliquais. Nous sommes après tout bien peu de choses dans cette cité du crime.
En passant par l'étage, on remarque d'autres douilles, des calibres divers et variés, des vêtements calcinés et M. MacGregor semble me montrer qu'il reste un homme de bureaux ou d'actions dites "propres". Rien à voir avec les carnages de proximité auxquels la ville nous a habitués.

" Je me trompe où vous n'êtes pas là par hasard ... Enfin, je veux dire ... Votre bureau vous a-t-il donné une idée des agresseurs de ce bâtiment ? Car, mis à part l'ampleur du carnage, nous sommes toujours sous la juridiction de la Police du Comté. "

Histoire qu'on soit bien sur la même longueur d'ondes. J'ai du mal à m'imaginer travailler avec un Fédéral qui ne me dit pas la finalité de son action. Je déteste avoir la désagréable sensation de me faire exploiter. Et si ce bureaucrate se met dans l'idée de m'entuber à sec et de repartir à l'anglaise, il risque fort d'être déçu ...

Je déteste ce moment. Celui où je dois gentiment lui dire d'aller se faire voir, parce que le FBI préfère jouer cavalier seul. Normalement je devrais prétexter des informations confidentielles et lui dire que l'affaire ne relève désormais plus de la juridiction du Comté. Il s'agit ici d'une mafia qui a été pratiquement entièrement démantelée, par la force, et certainement par une autre mafia, mieux armée et mieux organisée. Ce qui ne laisse pas énormément de possibilités, même si la plus tentante reste celle de l'implication d'O'Sullivan.

Normalement, je devrais m'emparer de la scène du crime, demander à tout le monde de sortir et interdire l'accès du site à toute autre personne que celle appartenant au FBI. Seulement voilà, j'ai toujours trouvé cette consigne débile, je suis la preuve vivante qu'une coopération entre police municipale et agence fédérale peut aboutir à d'excellents résultats, bien souvent meilleurs que si le FBI s'occupait seul de la situation. Alors autant gagner du temps et éviter la partie où l'on se fâche inutilement pour au final quand même coopérer. La police est plus proche des habitants, et par conséquent peut apprendre des choses plus rapidement, tandis que le FBI est plus libre de ses mouvements, et par conséquent plus apte à faire certaines choses, voilà pourquoi la coopération est indispensable.

Je me tourne vers le Lieutenant Hatsen, un air de conspirateur sur le visage.

"Normalement, c'est le moment où je suis censé vous dire tout ceci est confidentiel et que cela relève désormais de la juridiction du FBI, car c'est effectivement le cas.
Heureusement pour vois, dirais-je, je sais pas expérience que l'on ne gagne rien à se mettre la police locale à dos pour des affaires administratives, je vais donc éclairer votre lanterne."

Petite pause, rapide regard autour de moi, comme pour vérifier s'il n'y a pas d'oreilles indiscrètes, même si l'immeuble en est sensiblement rempli.

"Le fait est que nous avions quelqu'un d'infiltré dans ce gang, qui s'avère être bien plus qu'un simple gang de quartier, mais une véritable mafia locale. Je n'ai pas eu accès au dossier de notre espion, mais il est probable qu'il soit parmi les cadavres présents ici. Ce que nous savons de source sûr, c'est que cette mafia, connue sous le nom de Neo Black Muslim, versait dans pas mal de traffic, dont traffic d'armes et de drogues. C'était une des mafia les plus craintes de la ville, avec celle des Natifs, présumée dirigée par William O'Sullivan. Ce qui me fait penser qu'il est fort probable que ce soit les Natifs qui soient responsables de ce carnage. Le problème est de le prouver de façon efficace. Ce qui nous fait présentement défaut."

Autre petite pause, pour reprendre un peu mon souffle.

"Tout ce qu'on sait, c'est que la puissance de feu et l'organisation des attaquants était supérieure à celle des Neo Black Muslim, en résulte ce carnage impitoyable.
Le détail qui me dérange, est la mort des femmes et des enfants. Il semblent qu'elles n'aient pas vraiment cherché à se défendre, cela ressemble à une exécution en règle. Et c'est là que je ne comprend pas pourquoi. Il fallait vraiment que O'Sullivan ne veuille plus jamais revoir cette mafia dans le coin pour justifier une telle férocité..."

Par réflexe, je met mes mains dans mes poches, une mauvaise habitude qui me vaut plusieurs remarques comme quoi je suis négligé. En même temps, c'est comme si j'en avais quelque chose à foutre d'être négligé.

"A mon avis, la meilleure chose à faire est de nous baser sur ce que nous pouvons savoir, autrement dit tout ce qui se rapporte directement au Neo Black Muslim. Il y aura forcément un événement auquel ils ont participé qui leur a attiré les foudres du Parrain. C'est là que vous nous serez utile, nous iront plus vite si vous épluchez les plaintes et autres témoignages dans les fichiers de la police, tout ce qui concerne des afro-américain doit être pris en compte. le simple fait qu'un enfant black ait écrasé le château de sable d'un gamin irlandais suffirait à déclencher une guerre. O'Sullivan est un type dangereux...
Je suis pratiquement sûr que c'est de son fait."

C'est vrai que ce ne sont que des suppositions. Mais d'une manière ou d'une autre, tous les sales coups en ville sont plus ou moins reliés à O'Sullivan. Ce type contrôle les deux bons tiers de la ville. Le pire, c'est qu'il est vicieux. Donc très dangereux.

Le chapeau de magicien a bien révélé son fait. Travailler comme il le fait présente des avantages ... et de sacrés inconvénients. Une taupe morte ne sert à rien. Donc, avoir un infime espoir de terminer cette affaire dans la légalité est complètement superflu. A moins de tomber sur des survivants ou un flagrant délit, nous sommes foutus. Et je suis d'accord avec lui sur certains points. J'étais tellement déboussolée par l'ampleur du carnage que j'en ai oublié les fondamentaux: qui aurait pu avoir la puissance de feu pour faire cela ? Mais ce qui me fait frissonner le plus ... C'est de me dire que cette histoire n'a pas été qu'une question de puissance de feu ... Il y a pu avoir la technique ... Et le talent qui ont joué. Ou du moins, un gros gros travail.

" Merci pour ces informations, Agent McGregor. J'apprécie beaucoup votre franchise. Je peux envoyer quelques agents fouiller de la paperasse en espérant trouver quelque chose ... Mais je pense que la réponse à nos questions se trouve sur le terrain. S'ils étaient versés dans des trafics d'armes et de drogues, ils avaient leurs rendez-vous, leurs habitudes ... Et tout cela, votre agent infiltré a dû le consigner ou y prendre part ... Ou s'être avéré totalement inefficace, malgré tout le respect que je peux avoir pour son statut. "

Si vous tenez tant à chasser de l'Irlandais, il faut s'attaquer à autre chose qu'à des liasses de plaintes sans motif exposées dans nombres d'archives. L'idée de départ est bonne, mais elle ne mènera pas à grand chose, je le crains. McGregor est quelqu'un d'intelligent, mais de quelque peu naïf. Les mafias noires ne fonctionnent pas de la même façon que les américano-siciliennes ou les irlandaises. Elles sont plus diffuses, s'impliquant sur la participation ponctuelle de gangs. Et quoiqu'en pense McGregor, il y avait bien différents gangs ici. O'Sullivan, et c'est très probable que ce soit lui qui ait fait le coup, a sans doute attaqué alors qu'il savait quoi trouver. Il est très fort.

" Faites-moi plaisir, Agent McGregor. "

...

" Ne me considérez pas comme une simple gratte-papier sous prétexte que je suis une locale, si vous souhaitez toujours une coopération en bonne et due forme... Permettez-moi de vous suggérer d'élargir vos champs de recherche parmi d'autres indics infiltrés dans des gangs blacks de la ville. Si vous trouvez un gang qui porte les mêmes couleurs qu'un cadavre d'ici ...

Autre petit silence, la policière tourne déjà les talons pour rejoindre l'étage supérieur.

" Vous m'avez comprise. "

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